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« Ce qui nous arrive ici, en plein visage, à l’improviste, ce n’est pas l’habituelle matière à curiosité […], ce précieux butin, il n’était pas à la portée d’un touriste ordinaire, ou même à un ethnologue du modèle habituel, de le conquérir […] Pierre Verger ne dit pas tout, et ne montre pas tout. Car c’est, aussi, un sage. » Préface de Théodore Monod, dans Pierre Verger, Dieux d’Afrique, Paris : Paul Hartmann, 1954.
À propos de l’exposition
À la frontière séparant les États-Unis et le Mexique se dresse une barrière, une muraille sinistre et connue de tous. À elle seule, elle incarne tous les murs et refus de l’autre. Dans Amexica, la photographie est un champ de bataille. On s’y affronte dans un combat entre communautés, cultures et pays. On y voit surtout s’y mener une lutte sans merci entre individus et entre genres.
Dans un territoire circonscrit par des matériaux agressifs, les contradictions ne peuvent se régler sans heurts ; une arène où, à la fin, ce sont toujours les mêmes qui doivent s’avouer vaincus. Clivage racial, clivage de classe, tout ici s’oppose dans un affrontement où l’un des protagonistes supplie, et l’autre humilie. Monde binaire, alternance de lumière naturelle, aveuglante, et d’obscurité, précarité contre abondance, ville et désert, bricolage et sophistication, milices opposées aux coyotes, comme si cette partie du monde ne fonctionnait qu’en termes schématiques ! Il faut pourtant en convenir, les soirs de pleine lune, dans l’alternance du jour et de la nuit, se joue le combat entre deux forces, entre deux pulsions, celles de la vie et de la mort, de l’amour et de la haine. La ligne de démarcation indique clairement le territoire du maître et le territoire du faible.
Dans une suite photographique consacrée à la représentation d’une réalité apocalyptique à la frontière entre le Mexique et les États-Unis, Marie Baronnet ne laisse rien dans l’ombre. Par l’emploi d’une couleur franche, souvent contrastée, avec une tonalité crépusculaire, la photographe fait ressortir la nature d’un conflit qui déchire les communautés. Son attention se porte sur des instants quelconques et juxtapose des moments qui rendent intelligibles le processus, l’apartheid mis en place par le mur, dans l’urgence, portrait par portrait, de saisir le drame qui nous fait face, ses protagonistes et ses modalités.
Marie Baronnet
Photo-journaliste indépendante pour la presse française et américaine (Libération, Le Monde, L’Obs, Newsweek, Sunday Times, etc), Marie Baronnet entame une démarche documentaire à partir des années 2000. Entre 2009 et 2019, elle documente régulièrement la frontière américaine et mexicaine et réalise sur ce sujet son premier film documentaire Amexica (95 min, 2020), coproduit par la société Velvet Film de Raoul Peck et Arte. En 2023, le Centre de la photographie de Mougins lui consacre une exposition monographique sur son travail à la frontière et présente pour la première fois depuis sa diffusion sur Arte le film Amexica.