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PLEINE LUNE EN POISSONS

JAGNA CIUCHTA + INVITE.E.S

EXPOSITION ANNIVERSAIRE

Pictures of the event

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À l’occasion de ses 10 ans, le centre d’art organise une exposition réunissant celles et ceux qui ont contribué à son histoire : artistes, artisans, bénévoles et associations actives sur le territoire et engagées aux côtés des Capucins. Nous souhaitons fêter cet anniversaire en célébrant l’énergie collective et les pratiques collaboratives qui ont porté jusqu’alors l’ensemble des projets. L’artiste Jagna Ciuchta est invitée à imaginer une scénographie associant ainsi pratiques amateurs et professionnelles, artistiques et artisanales.

PLEINE LUNE EN POISSONS

Jagna Ciuchta + invité.e.s

Les Capucins ont 10 ans, bientôt 11. Parce que c’est l’âge où tout pousse et que l’énergie déborde, on doit renouveler ses baskets tous les deux ou trois mois. Le centre dart est un pré-adolescent qui use semelles sur semelles pour attraper un monde qui grandit plus vite que lui.

Né sous une pleine lune en poissons, on lui prédisait déjà tout jeune un tempérament fougueux, sensible, ainsi que des prédispositions à entretenir de belles relations avec les autres. Cest ce quil sest attelé à faire ; au fil des ans il sest constitué une grande famille de camarades et dami.e.s.

Il a toujours su quil ne ferait rien tout seul, quil devrait sentourer de personnes qui ne lui ressemblent pas forcément. Pour son anniversaire, il a rêvé dun rassemblement joyeux, dune exposition qui célébrerait l’énergie que lui ont apportée toutes celles et tous ceux qui ont contribué à son histoire, artistes comme artisans, bénévoles, collaborateur.rice.s.

Il les a invité.e.s à présenter une pièce, un document, au sein dune installation in-situ, conçue par lartiste Jagna Ciuchta, quil avait rencontrée en 2015, à loccasion dune précédente collaboration embrunaise. Le dispositif dexposition est ainsi une création spécifique, une terre daccueil pour des pièces aux histoires toutes différentes.

Ce territoire ne pouvait être quun ailleurs à toutes les œuvres. Au-delà dimaginer des liaisons possibles, des conditions de dialogue, il fallait penser une manière de faire communauté. Jagna Ciuchta a ainsi renoncé aux effets de séduction immédiats qui renvoient toujours à des territoires connus, pour créer un paysage qui nest celui d’aucune pièce en particulier et donc celui de toutes.

Lexposition est une œuvre, composée dune centaine dautres. Elle est une île balayée par les vents. Lartiste na pas défini un cheminement, mais conçu son installation, traversant lespace des Capucins, comme un rhizome percé de portes. Entre, des parois daccrochage dont la structure composée de rails métalliques est recouverte de plaques de plâtre, de plexiglass ou encore dosier tissé. Dès lentrée, le regard est ainsi invité à circuler entre les surfaces opaques et fureter dans les interstices transparents doù certaines œuvres révèlent une partie intime delles-mêmes. Les murs dépourvus de pièces ne sont pas pour autant vierges, ils prolongent visuellement le mouvement ondoyant de linstallation par des aplats électriques de peinture.

Lexposition est une île. Comme Lina Bo Bardi notamment en a imaginée une pour le formidable Musée dArt de Sao Paulo auquel se réfère souvent Jagna Ciuchta. En dégageant le plateau dexposition, grâce à deux énormes portiques supportant l’édifice, larchitecte et scénographe a libéré les tableaux des murs. Par un système daccrochage en béton et en verre pour la partie supérieure, ils sont mis à nus et semblent flotter dans lespace. Le dos des toiles est exposé, il devient un sujet, un objet en soi. Il raconte quelque chose de lhistoire de l’œuvre.

Cette dimension sentimentale, qui nest pas évidente quand on appréhende le travail de Jagna Ciuchta, est pourtant essentielle. Elle tente de révéler autre chose que ce que les pièces présentent habituellement. Une forme de vulnérabilité qui raconterait une histoire différente de ce qui les a traversées, de celles et ceux aussi qui les ont conçues. Une histoire des origines, des désirs et des doutes, une histoire de la création.

Solenn Morel