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Ateliers, Exposition

Le lac avec des muscles

Exposition les deux premiers week-ends de décembre 2018 de 15h à 18h Dimanche 2 décembre entre 15h à 16h30 : Atelier de dessin par Louise Aleksiejew et Antoine Medes à l’attention des 7/10 ans     Louise Aleksiejew et Antoine Medes sont les artistes invités pour cette sixième édition du Noël de l’Art, qui cette […]

Exposition les deux premiers week-ends de décembre 2018 de 15h à 18h

Dimanche 2 décembre entre 15h à 16h30 : Atelier de dessin par Louise Aleksiejew et Antoine Medes à l’attention des 7/10 ans

 

 

Louise Aleksiejew et Antoine Medes sont les artistes invités pour cette sixième édition du Noël de l’Art, qui cette année investit le centre d’art au lieu du centre-ville d’Embrun. Ce projet comme précédemment s’inscrit dans le cadre d’une résidence en milieu scolaire. Les réalisations présentées sont ainsi le fruit d’une étroite collaboration entre les artistes et les enfants de classes primaires qui ont participé à ces ateliers.

Louise Aleksiejew et Antoine Medes sont dessinateurs, ils développent leurs recherches individuellement et en duo. Depuis la fin de leurs études à l’école des beaux-arts de Caen en 2016, ils partagent nombre de projets dont Ping-Pong, au départ une discussion graphique qui prend maintenant la forme de dessins réalisés à quatre mains sans que l’on distingue spécifiquement le trait de chacun. Ils accumulent, depuis très jeunes, dans leur logiciel mental des images issues de bandes dessinées, de fanzines, du cinéma d’animation ainsi que plus tard de livres d’artistes. Ils puisent également dans le flot inépuisable des images diffusées sur internet, dont l’organisation horizontale autorise une circulation intuitive, sans hiérarchie stylistique, ni technique. Des Chicago Imagist, par exemple, groupe d’artistes associé à l’école de Chicago à la fin des années 60 aux représentations de yokais, ces créatures surnaturelles du folklore japonais, que le duo aime citer comme référence.

La profusion participe pleinement de leur mode opératoire. D’un côté, la collecte constante, de l’autre, la pratique assidue du dessin qui n’exclut pas pour autant les réalisations en volumes, des installations en tissu ou la céramique notamment. Comme si l’intuition était inhérente au foisonnement, à l’éparpillement même. Explorer loin, profondément, jusque dans les plis de l’imagination, pour y puiser la faculté à déformer, et détourner les images. Dans cet interstice entre deux mondes, les leurs d’abord puis ceux des autres, dans cette chambre d’échos, ils se saisissent à coups de glissements successifs du pouvoir de métamorphose des formes. Ils l’incarnent dans des lieux, objets et créatures fantômes qui se réinventent sans cesse, dans une suspension fictionnelle active.

D’abord il y a les images, toujours chez Louise Aleksiejew et Antoine Medes, jusque dans leur manière de parler, probablement car l’abstraction n’est pas leur langue. Ils parlent soupe pour le mélange des références, jeu de société pour la composition des images ou encore chewing-gum qui s’étire pour la cohabitation de leur pratique individuelle avec celle en duo. Pour cette série d’interventions auprès de scolaires, ils ont parlé lac, monstre, barrage, construction. Le décor est planté, celui du lac artificiel de Serre-Ponçon qui s’étend notamment sur le site de Savines aujourd’hui disparue (mais reconstruite un peu plus haut sous le nom de Savines-le-Lac).

L’histoire à imaginer commence ainsi par un ensevelissement, un recouvrement qui en effaçant le monde d’avant en crée deux nouveaux : celui de la lumière, des reflets floutés des monts enneigés sur la surface scintillante, et celui des profondeurs, sombre et secret, qui suscite peur et fascination. Reste un troisième monde à imaginer au contact des deux premiers : un lac animé de fantastiques pouvoirs. Un lac avec des muscles, hébergeant des poissons-radiateurs, du sable gluant, des téléphones-cailloux, des bras flottants et du bois lumineux. Inventer des formes venues d’ailleurs, de sous les sédiments du connu, du vraisemblable, du rationnel. Les artistes émettent l’hypothèse que c’est en creusant les images, en élargissant leur potentiel fictionnel qu’on parvient à comprendre comment elles se construisent. A travers Le Lac avec des muscles, ils racontent, avec la complicité des enfants, la construction d’un paysage issu de collages successifs, en l’occurrence celui de Serre-Ponçon – qui génère depuis sa dernière transformation, des images aussi séduisantes qu’épatantes comme celle de faire de la planche à voile face à un mur de montagnes.

Solenn Morel